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La guerre dans l'ouest : campagne de 1870-1871
| Chapitre 2 | 
Premières entreprises des fourrageurs ennemis après l'investissement de Paris
      
         Source : L. Rolin.
          
         
          
 
        
  Les premiers partis ennemis qui envahirent l'Ile-de-France et la Normandie 
  étaient des détachements de l'armée de la Meuse. 
  Dès que l'armée du Rhin fut enfermée dans Metz, les Allemands virent
  bien qu'il leur serait possible de la contenir avec moins de forces
  qu'ils n'en avaient déployé jusque-là; c'est pourquoi le 19 août,
  le lendemain même de la bataille de Saint-Privat, ils formèrent
  une IVe armée, qui reçut pour mission de marcher à la droite de celle 
  du prince royal et d'opérer de concert avec elle.
  Cette nouvelle armée, qui se composait de la garde prussienne,
  du IVe corps, du XIIe (Saxons), des 5e et 6e divisions de cavalerie,
  prit le nom d'"armée de la Meuse" et fut placée sous les ordres
  du prince royal de Saxe : c'était une manière
   
  adroite de gagner les Saxons, de leur faire oublier Gitschin
  et Konigsgratz, et de tâcher d'effacer les souvenirs qu'a laissés
  parmi eux la campagne de 1866.
  Après avoir servi de pivot à la conversion qui eut pour résultat
  d'envelopper à Sedan le maréchal de Mac Mahon, l'armée de la Meuse,
  conjointement avec celle du prince royal de Prusse, se dirigea sur 
  Paris aussitôt après la capitulation.
  D'après le plan adopté par le grand quartier général prussien pour 
  l'investissement de Paris, l'armée de la Meuse dut occuper la rive
  droite de la Seine et de la basse Marne, et chacun des corps qui
  la composaient resta jusqu'à la fin du siège dans les positions 
  qui lui avaient été assignées dès le début.
  Le IVe corps sur la rive droite de la Seine, entre Chatou et Epinay,
  quartier général à Soisy; la garde déployée dans la plaine qui 
  s'étend au nord de Saint-Denis, entre Montmagny et le Blanc-Mesnil,
  quartier générai à Gonesse; 
  le XIIe corps, depuis Aulnay jusqu'à
  la rive droite de la Marne, occupant la forêt de Bondy,
  quartier général au Vert-Galant.
  La 5e division de cavalerie prit position entre Poissy et Neauphle,
  quartier général à Saint-Nom-la-Bretèche;
  la 6e division entre Neauphle et Chevreuse, quartier général à
  Mesnil-Saint-Denis; la brigade des uhlans de la garde, 
  établie à Argenteuil, se tenait en communication à Saint-Germain
  avec la 5e division de cavalerie. 
  
  Le quartier général du prince de Saxe fut établi le 19 septembre
  au grand Tremblay, et le 12 octobre à Margency.
  Pour fermer le cercle d'investissement, 
  
   les positions de la
  IIIe armée allemande  étaient les suivantes:
 la division wurtembergeoise sur la rive gauche dela Marne,
 entre Noisy-le-Grand et le chemin de fer de Lyon; 
 le VIe corps sur les deux rives de la Seine, observant la boucle de
 la Marne, la plaine d'Alfort et les hauteurs de Villejuif, jusqu'au
 chemin de fer de Sceaux; 
 le IIe  corps bavarois sur les deux rives de la Bièvre et les plateaux
 de Châtillon;  
 la 21e division à Ville-d'Avray, Sèvres, Meudon,
 Clamart;   
 le Ve corps dans la région accidentée qui s'étend entre
 Saint-Cloud et la Malmaison.
 Une fois le blocus de Paris organisé le grand quartier général
 prussien s'occupa de le protéger extérieurement par une sorte 
 de seconde ligne d'investissement, tournée en sens inverse,
 et ayant pour but de s'opposer à toute tentative de nos armées
 de province pour secourir la capitale.
 Les quatre divisions de cavalerie allemande rayonnèrent aussitôt 
 à l'extérieur de ce cercle pour éclairer le pays, disperser 
 les rassemblements, désarmer les habitants, et surtout
 pour assurer le ravitaillement de leur armée de siège.
  
 
  
   
 
  
 En campagne, le soldat allemand porte ordinairement dans son 
 sac une journée de vivres, qui n'est consommée que quand
 les réquisitions n'ont pu être faites et que les ressources
 locales sont insuffisantes.
 Chaque division est suivie, à une journée de marche,
 par une  colonne de vivres : Feld-proviant-colonne, qui
 marche non sur la même route, mais sur une route 
 parallèle,
 afin d'éviter tout encombrement et tout 
 retard; cette colonne  porte un approvisionnement de
 plusieurs jours, ménagé et renouvelé avec soin et ne
 servant que pour les concentrations extraordinaires
  
  qui précèdent ou suivent les grandes batailles. 
 
 Les
 Allemands possèdent en outre des fours roulants de
 campagne, et, en cas de nécessité, la farine peut être
 rapidement transformée en pain.
 Ce sont ces dispositions
 qui donnent aux troupes allemandes une grande
 mobilité.
 A la guerre, les Prussiens n'ont rien inventé,
 mais ils ont 
 presque tout fait progresser, à
 l'exception toutefois du droit des gens.
 Leur système d'alimentation est celui de Napoléon Ie.
 Leurs états-majors sachant se servir de toutes les voies de 
 communication, multiplient le nombre des colonnes,
 conduisent les troupes par les chemins vicinaux, au
 besoin à travers champs, et laissent les grandes routes
 aux bagages, aux équipages de ponts, aux services
 du transport et du matériel, et aux autres impedimenta;
 en un mot, ils savent se servir non-seulement d'un
 chemin de fer, mais encore d'une route, et ils y font
 passer quatre fois autant de troupes que nous dans le
 même temps,  sans croisement, sans allongement
 de colonnes et sans désordre. 
 
 C'est dans cet art de 
 conduire leurs troupes, où les Prussiens apportent
 beaucoup de méthode, d'ordre et de précision,  qu'il
 faut voir, à notre avis, une des principales causes
 de leurs succès.  
 
 Depuis leur départ de Metz, les Allemands, marchant sur
 un front très étendu, traversant des contrées
 riches dont ils connaissaient aussi bien que
 nous les ressources, vécurent exclusivement sur le
 pays, et le soldat ne toucha pas à la journée de vivres
 de réserve qu'il portait dans son sac : Die Verpflegung
 der truppen erfolgte lediglich  durch Requisitionen.
 
 
  
 
Mais en arrivant près de Paris, ils furent obligés de
 se concentrer, et, en outre, ils ne tardèrent pas à
 s'apercevoir que  le vide avait été fait à une certaine
 distance autour de  la capitale. 
 
 A dix lieues à la ronde,
 il leur fut impossible de trouver, à l'exception du vin,
 des provisions de quelque importance.
 Ils furent donc 
 forcés d'entreprendre de petites expéditions, de se 
 contenter de ce qu'ils pouvaient arracher aux habitants, 
 et ils avouent aujourd'hui qu'à cette époque leur
 armée vivait au jour le jour : So lebte die Armee aus
 der Hand in den Mund.
 Jusqu'à la capitulation de 
 Toul, ils ne pouvaient espérer de se ravitailler au
 moyen de convois venus directement d'Allemagne, 
 et, même après la chute de cette place,
 la voie ferrée qu'ils rétablirent ne servit guère qu'au
 transport de leur parc de siège, de leurs munitions et de 
 leurs troupes de remplacement;
 aussi leur premier soin,
 une fois l'investissement achevé, fut d'organiser
 autour de Paris un vaste système d'impitoyables
 réquisitions.
 Chose digne de remarque, l'intendance 
 française, au contraire, n'a eu recours à ce moyen
 qu'avec la plus grande répugnance, elle n'a jamais
 voulu s'écarter des habitudes de la routine, elle a
 rarement essayé d'acheter sur place, et elle a 
 continué son exclusif et désastreux système d'emmagasinage.
 Un des membres les plus distingués de ce corps
 dénonçait, il y a quelques années, comme une
 illusion et  une chimère, l'idée de faire vivre sur le
 pays le plus riche une armée réunie de deux cent
 mille hommes pendant un mois seulement.
 Les Allemands ont fait de cette chimère une dure réalité;
  
  
 le problème a été résolu à nos dépens, et l'intendance 
 française, qui est chargée de liquider les réquisitions, 
 pourra savoir dans quelle proportion l'ennemi a vécu
 sur notre malheureux pays.
 
 
 Dans tous les cas, elle
 fera bien de profiter des leçons de l'expérience, et de
 renoncer à des traditions surannées qui ont fait que,
 dans la dernière guerre, elle est restée complétement 
 au-dessous de sa tâche. 
 
 Pour assurer leur ravitaillement, les Allemands
 établissent à Corbeil, à Saint-Cyr, à Chantilly, de
 vastes magasins d'approvisionnements qu'ils s'efforceront
 de maintenir constamment pleins, et c'est 
 pour cela qu'ils vont lancer leurs divisions de cavalerie 
 dans toutes les directions.
 La Beauce, le Beauvaisis, 
 le Vexin, ces plaines riches et fertiles sont 
 ouvertes aux excursions de leurs fourrageurs, où nous
 allons les suivre successivement. 
 
 Partie le 17septembre de Nanteuil-le-Haudouin, la 
 5e division de cavalerie prussienne (général-lieutenant
 de Rheinbaben) avait passé par Pontoise, franchi 
 la Seine à Triel, s'était avancée le 19 entre 
 Poissy et Neauphle, comme on l'a dit plus haut, et 
 avait mis son quartier général à Saint-Nom. 
 
 A peine établie dans ses positions et le cercle d'investissement
 fermé, cette division entreprit des expéditions
 fréquentes sur la rive gauche de la Seine où nous
 la verrons opérer pendant toute la durée de la guerre.  
   
	
 Pointe de la brigade de Bredow sur la rive gauche de la Seine :
	Rencontre d'Aulnay-sur-Mauldre;
	Pointe de la brigade de Bredow sur la rive gauche de la Seine :
	Rencontre d'Aulnay-sur-Mauldre;
	incendie de Mézières; apparition de l'ennemi à Mantes (22 septembre)
 
	
	
 Dès le 21 septembre les premiers éclaireurs de la
 12e brigade (général-major de Bredow), des uhlans 
 du 16e régiment , s'avancèrent dans la direction de Mantes.
 A leur approche, le maire de Mézières avait 
 fait charger sur des voitures les fusils de la garde
 nationale, afin de les soustraire à l'ennemi; 
 sur ces
 
 entrefaites, les cavaliers prussiens  font irruption dans
 le village, s'emparent des armes et les consignent au
 maire, en lui faisant jurer de les conserver à leur 
 disposition jusqu'au lendemain.
 Dans la matinée du 22, à l'heure dite, ils reviennent pour les emporter; 
 mais dans l'intervalle elles avaient été enlevées par 
 une quarantaine  de francs-tireurs de Mantes et des 
 environs.
 Ceux-ci, embusqués à l'entrée du village,
 font feu sur les deux premiers uhlans  qui se présentent,
 les blessent mortellement, et s'enfuient à toutes
 jambes, tandis que les autres cavaliers tournent bride.
 Le soir l'ennemi revient en force; le général de Bredow 
 en personne, à la tête d'une colonne de cavalerie
 et d'artillerie  appuyée par un détachement 
 d'infanterie bavaroise , se dirige sur Mézières.
	 RENCONTRE D'AULNAY-SUR-MAULDRE :
	RENCONTRE D'AULNAY-SUR-MAULDRE :
 
 En passant
 à Aulnay-sur-Mauldre, une reconnaissance du 13e
 régiment de dragons du Schleswig-Holstein  essuie la
 décharge de quatre  francs-tireurs venus à la
 découverte.
 Les francs-tireurs, qui ont blessé un dragon , 
 expient chèrement cet exploit : attaqués par
 l'avant-garde ennemie, deux d'entre eux sont tués sur place, 
 un troisième est blessé, et le quatrième seul peut
 s'échapper sain et sauf.
 Le général de Bredow  
 continue sa route, et vers quatre heures il prend position
 à peu de distance de Mézières. 
 
 Une patrouille y 
 pénètre, arrête le maire et le traîne devant le général,
 qui le somme de lui fournir des explications. 
 
 Pendant ce temps trois uhlans  poussent jusqu'à l'autre 
 extrémité du village, et y rencontrent deux  francs-tireurs 
 attardés, qui, surpris eux-mêmes, s'enfuient après
 avoir déchargé leurs armes.
 Au bruit des coups de
 feu, le général de Bredow  ne veut plus rien entendre;
 c'est en vain que le maire essaye de se justifier,
 
 accablé de coups et foulé sous les pieds des chevaux, il 
 ne doit son salut qu'à la fuite.
	 INCENDIE DE MÉZIÈRES :
	INCENDIE DE MÉZIÈRES :
Pendant une heure, le malheureux village de Mézières, rendu responsable d'une rencontre que ses habitants ne pouvaient empêcher, est canonné et criblé d'obus; puis, après que l'ennemi l'a traversé pour continuer sa route sur Mantes, son arrière-garde, la torche à la main, y met le feu : une soixantaine d'habitations sont la proie des flammes.
	 APPARITION DE L'ENNEMI A MANTES (22 septembre) :
	APPARITION DE L'ENNEMI A MANTES (22 septembre) :
 A cinq heures, le général de Bredow est aux portes
 de  Mantes.
 Après y avoir lancé une douzaine d'obus, 
 il lâche sur la ville l'infanterie bavaroise du 2e
 régiment "Prince royal" , qui saccage les deux gares,
 tue ou blesse plusieurs employés du chemin de fer, et 
 emmène les autres comme otages.
 La population
 affolée s'enfuit jusque dans les bois de Rosny; le
 lieutenant-colonel Mocquard, commandant le 
 régiment des éclaireurs de la Seine, arrivait en ce
 moment et s'apprêtait à courir à l'ennemi on le supplie
 de renoncer à une attaque dont le résultat serait
 d'attirer sur la ville les mêmes représailles qu'à
 Mézières, dont l'incendie embrase l'horizon.
 Après cette courte mais terrifiante apparition aux
 portes de Mantes, le général de Bredow retourne 
 dans ses cantonnements en traversant les ruines
 fumantes de Mézières à moitié détruit.
 Le lendemain,
 en déblayant les décombres, on trouva sous les ruines
 de la même maison six cadavres étroitement
 entrelacés : le père, la mère et quatre enfants avaient 
 péri asphyxiés dans les flammes. 
 
 Toute une famille
 avait été la victime de ces horreurs, dignes des
 temps barbares.
 
 
 
	   
	
	 Marche des détachements prussiens et saxons sur la ligne de l'Oise
 Marche des détachements prussiens et saxons sur la ligne de l'Oise
 
	Sur la rive droite de la Seine, l'armée de la Meuse
 
 avait établi ses magasins à Chantilly. 
 Pour les 
 remplir et les protéger, elle s'empressa de faire occuper
 Creil. 
 Ce point stratégique, qui est le nœud de 
 plusieurs embranchements de chemin de fer rayonnant 
 en forme de patte d'oie sur Compiègne,
 Clermont, Beauvais   et Pontoise  
 , était naturellement désigné, et
 déjà l'ennemi l'avait fait reconnaître par ses
 flanqueurs. 
 Dès le 15 septembre, Creil et Chantilly avaient été 
 visités par des détachements de la 6e division de
 cavalerie 
 qui occupait alors Senlis. 
 L'invasion de la gare de Creil fut accompagnée de circonstances
 assez curieuses, qui ont été relatées dans un 
 intéressant travail sur le chemin de fer du Nord pendant la
 guerre. 
 Bien que la cavalerie ennemie fût signalée,
 on ne l'attendait pas si tôt, et des machines
 remorquant des fourrages arrivaient de Beauvais; tout à 
 coup les uhlans débouchent par la route de Senlis,
 font feu sur le train arrivant, envahissent la gare 
 des marchandises, s'emparent du matériel, fouillent
 et dévalisent les caisses de la grande et de la petite
 vitesse. 
 
 Ils étaient guidés dans cette opération par
 un ancien employé de la Compagnie du chemin de
 fer du Nord, allemand d'origine, qui, congédié
 quelques mois auparavant, s'était vanté "d'avoir
 travaillé pour le roi de Prusse". 
 Il s'était en effet
 livré, pour le compte de ce monarque, à des études
 très approfondies sur les divers services du chemin
 de fer; il savait dans quelles conditions se trouvait le
 réseau du Nord il connaissait tous les détails du
 service, et jusqu'au chiffre moyen des recettes
 journalières. 
 Nos ennemis ne manquèrent pas de mettre à 
 profit ces précieuses connaissances.  
 
 C'est ainsi que 
 nous nous croyions envahis depuis quelques semaines
 seulement, quand en réalité l'invasion remontait à 
 plusieurs années; depuis longtemps l'Allemagne avait
 lancé sur la France ses nuées d'employés et de
 commis, de pionniers et d'enfants perdus, qui avaient
 levé les plans de nos places fortes, étudié nos
 positions stratégiques, nos voies de communication, nos
 ressources et notre statistique; puis, au jour de la
 déclaration de guerre, elle avait rappelé à elle cette
 avant-garde d'espions qui avaient éclairé au loin dans
 notre malheureux pays la marche de ses troupes, et
 qui allaient les guider jusque sous nos toits
 domestiques. 
	
	 Occupation de Creil
 Occupation de Creil
 
 
 Visitée plusieurs fois depuis le 15 par les patrouilles
 ennemies, la ville de Creil
 ne fut occupée à demeure
 que le 23 septembre,  par un détachement de
 réquisition venu de Chantilly,
 sous les ordres du capitaine
 de Massow, et composé
 de deux pelotons de 
 cuirassiers et d'un piquet d'infanterie
 appartenant au corps 
 de la garde prussienne,.
 Le premier soin de l'ennemi
 en entrant à Creil fut de désarmer les habitants et de
 briser leurs fusils; sa présence excita dans la ville et
 dans les localités voisines de la vallée de l'Oise un
 soulèvement qui, s'il avait été secondé, aurait amené
 l'anéantissement certain des premières colonnes 
 réquisitionnaires mais le département, évacué par
 l'autorité militaire, était alors dégarni de troupes, au
 grand  désespoir des habitants. 
  
	
	
	 Rencontre de Laigneville
	Rencontre de Laigneville
 
 Le 25 septembre, un petit détachement d'un piquet
 de dragons, et d'une escouade de fantassins, s'avança
 de Creil
 jusqu'à Laigneville, sur la route de Clermont,
 pour y faire des réquisitions.
 La présence de ces 
 fourrageurs répand aussitôt l'alarme et fait naître
 l'exaspération chez les habitants de Liancourt; bien que
 désarmés par l'ennemi depuis quelques jours, ils 
 s'emparent de fusils de chasse et de fourches, et mettent
 à leur tête M. le duc de la Rochefoucauld, un ancien
 colonel de cuirassiers français qui, rendu à la retraite,
 était loin de s'attendre à diriger un jour cette chasse
 contre les cuirassiers prussiens.
 Mais, ainsi qu'il 
 arrive souvent dans ces battues, les plus pressés se
 firent voir, les Prussiens prirent l'éveil, et 
 s'apercevant qu'on cherchait à les tourner, déguerpirent au
 plus vite en abandonnant leur convoi.
 Ils furent 
 poursuivis jusqu'à Nogent-les-Vierges, et comme le 
 détachement de Creil s'avançait pour recueillir ces
 fuyards, son avant-garde fut saluée par une fusillade 
 qui blessa un cheval et fit tourner bride au reste de
 la troupe.
 Le capitaine de Massow, redoutant sans
 doute l'approche de forces supérieures, s'empressa 
 d'évacuer Creil, emmenant le maire
 comme otage, et 
 se retira par la route de Chantilly
 sur les hauteurs
 qui dominent la ville; il n'y rentra qu'avec deux
 compagnies du 2e régiment à pied de la garde
 prussienne, envoyées comme renfort sur ces entrefaites.
 
 
 Les habitants de Clermont, de leur
 côté, n'avaient
 cessé de réclamer depuis plusieurs jours près de
 l'autorité militaire pour obtenir un envoi de troupes qui
 vinssent les appuyer: dans la soirée du 25 septembre,
 ils virent avec satisfaction arriver dans leur ville 
 environ 1200 hommes du 3e bataillon des mobiles de
 la Marne (commandant de Breuil), 
 envoyés d'Abbeville
 par le chemin de fer. 
	
	 Rencontre de Liancourt; occupation de Chantilly et de Senlis (26 septembre)
	Rencontre de Liancourt; occupation de Chantilly et de Senlis (26 septembre)
 
 
 Ce secours ne leur fut pas 
 inutile quand, le lendemain, l'ennemi revint en force
 
 sur Liancourt : 
 un peloton de cuirassiers, un
 escadron du 18e régiment de uhlans saxons et un
 détachement d'infanterie, traînant à leur suite une 
 cinquantaine de chariots, partirent de
 Creil de bon
 matin pour aller réquisitionner de nouveau sur la
 route de Clermont. 
 
 Dès que les Allemands eurent
 dépassé Rantigny, le maire de cette commune se 
 hâta de demander du secours à
 Clermont, au moyen
 du télégraphe que, contre son habitude, l'ennemi 
 avait négligé de couper; mais la population, dispersée
 dans les marais, n'attendit pas l'arrivée des renforts
 pour commencer la fusillade; les premiers coups de
 feu blessèrent un uhlan saxon et coûtèrent la vie à
 un habitant inoffensif. 
 
 Cependant la nouvelle de la 
 marche de l'ennemi avait été bientôt connue à
 Clermont,
 où on avait battu lagénérale et sonné le tocsin.
 
 Les mobiles de la Marne, suivis des gardes 
 nationaux, se précipitent avec un élan remarquable et 
 un enthousiasme trop peu contenu au-devant de
 l'ennemi, qu'ils rencontrent à la hauteur de la
 Maison-Blanche. 
 
 Attaqués de tous côtés par les forces
 disséminées autour d'eux, les éclaireurs allemands font
 promptement demi-tour et se replient au galop sur le
 gros de la troupe, qui, resté en arrière, s'abritait 
 derrière ses voitures, placées à la hâte en travers de la
 route, à la hauteur du hameau de 
 Senecourt. 
 
 Rejoint
 et serré de près, l'ennemi se retire sur
 Liancourt, où 
 il essuie encore le feu des gardes nationaux
 embusqués dans les bois et les marais; poursuivi jusqu'aux
 abords de Monchy-Saint-Eloi,
 il rentre à Creil, en
 bon ordre il est vrai, mais moins nombreux qu'il n'en
 était parti.
 Cinq fantassins de la garde prussienne,
 qui réquisitionnaient à outrance dans un moulin, 
 
 furent surpris dans cette besogne et faits prisonniers :
 dirigés sur Clermont,
 ils y entrèrent vers une heure 
 de l'après-midi, et la vue de cette capture excita un
 vif enthousiasme.
 De notre côté, il y avait eu deux
 victimes parmi les habitants de
 Liancourt et de
 Monchy-Saint-Eloi.
 Tandis que la ville de
 Clermont s'armait et que
 plusieurs milliers de gardes nationaux venus des 
 communes voisines faisaient leurs préparatifs pour 
 repousser l'attaque prévue pour le lendemain, il 
 arrivait à Creil
 de nouveaux renforts qui allaient changer
 la situation. 
 
 Le capitaine de Massow ayant rendu 
 compte de l'accueil fait à ses fourrageurs, la 
 division
 de cavalerie saxonne reçut dans la nuit du 25 au
 26 septembre l'ordre de se diriger sur
 Chantilly, pour
 assurer d'une manière plus efficace le ravitaillement
 de l'armée de siège. 
 
 Cette division, commandée par
 le général-major comte de Lippe
 , était détachée du 
 corps auquel elle appartenait, et placée sous le
 commandement direct du quartier général de l'armée de
 la Meuse. 
 
 On lui avait adjoint provisoirement le
 bataillon de fusiliers du 2e régiment 
 à pied de la garde
 prussienne (major de Kropff),
 qui fut suivi peu de
 temps après par les autres bataillons du même 
 régiment. 
 
 Le comte de Lippe
 était chargé de 
 réquisitionner et d'étendre son rayon d'occupation dans le
 nord, de tenir constamment rempli le magasin de
 Chantilly, 
 et de rétablir les embranchements du 
 chemin de fer de Creil à Compiègne,
 Clermont et
 Beauvais. 
 
 Parti des environs d'Annette
 et de Thorigny à la
 réception de cet ordre, le 
 comte de Lippe,
 accompagné de l'état-major de sa division, du
 17e régiment
 
 de uhlans et de quatre pièces d'artillerie, atteignit
 Chantilly dans la matinée du 26; 
 en même temps il
 détachait à Senlis 
 la 24e brigade  (général-major
 Senfft  de Pilsach ), 
 tandis que le régiment de dragons de la 
 garde saxonne
 (major de Funcke ),
 avec une section
 d'artillerie à cheval, se portait rapidement
 sur Creil
 pour soutenir le capitaine de Massow,
 qui ne 
 paraissait pas très rassuré.
 Vers quatre heures du soir, ce
 dernier détachement arrivait à Creil au moment
 même où les fourrageurs, suivis de près par les gardes 
 nationaux de Liancourt, venaient de rentrer dans la 
 ville.
		
	
	
	
	 Prise de Clermont (27 septembre)
	Prise de Clermont (27 septembre)
 
 Persuadé que nous occupions en force les
 hauteurs de la rive gauche de l'Oise, le major
  de Funcke
 s'était concerté avec le capitaine
 de Massow pour une
 attaque qu'ils devaient faire ensemble le lendemain;
 mais dans la soirée même il fut informé que la marche
 sur Clermont 
 serait continuée le 27, et que le général
 major Krug de Nidda 
 arrivait avec le reste de la
 23e brigade 
 et prendrait lui-même le commandement
 de la colonne.
 La nouvelle de l'arrivée de ces renforts parvint à
 Clermont dans la soirée du 26.
 Le commandant des
 mobiles de la Marne ayant contrôlé ces
 renseignements, s'assura qu'il aurait à se mesurer avec un
 ennemi supérieur en nombre, muni d'artillerie, et
 contre lequel il ne lui serait pas possible de lutter
 avantageusement.
 Conformément aux instructions
 qu'il avait reçues, il quitta la ville pendant la nuit,
 malgré les habitants, et se retira par
 Bresles et
 Saint-Just sur
 Breteuil,
 où il arriva dans la soirée du
 lendemain.
 
 Le 27 septembre, dès six heures du matin, les 
 gardes nationaux d'Angy,
 de Mouy et de Cauvigny, 
 auxquels s'étaient joints des habitants des communes 
 voisines énergiquement résolus à défendre leurs 
 foyers, se portaient dans la direction de
 Liancourt. 
 
 Arrivés sur les hauteurs d'Ars,
 ces braves gens s'y 
 arrêtèrent: ignorant le départ des mobiles de la
 Marne et n'ayant reçu aucun ordre, ils attendirent
 là les renforts qu'ils supposaient devoir arriver et la
 direction militaire dont ils avaient le plus grand
 besoin mais ils furent bientôt cruellement déçus dans
 leur attente, car au lieu du secours qu'ils espéraient,
 ils ne tardèrent pas à setrouver en présence des
 éclaireurs ennemis.
 Bien que sans appui, ces troupes
 improvisées engagèrent le feu avec le même entrain
 que la veille.
 Le général Krug, 
 de son côté, était parti
 de Creil
 avant le jour, à la tête d'une colonne composée du
 régiment de dragons de la garde saxonne, de deux 
 escadrons du 18e ublans, du bataillon de fusiliers de
 la garde prussienne et de quatre pièces d'artillerie,
 en tout près de 2000 hommes. 
 
 Il n'avait laissé  à
 Creil que
 deux pièces et un escadron, qui avaient pris
 position au sud de la ville pour la tenir en respect et
 couvrir la retraite en cas d'insuccès.
 Pour cette 
 expédition, le général saxon avait pris des dispositions
 savantes qui font surtout honneur à la poignée de
 braves gardes nationaux qu'il avait devant lui. 
 
 Il avait 
 réparti ses troupes en trois colonnes :
 sur la route
 de Clermont, se
 portaient un escadron de dragons et
 une compagnie d'infanterie;
 dans le défilé à l'ouest
 de Nogent,
 marchaient les trois autres compagnies 
 précédées d'un peloton de uhlans; enfin sur la route
 
 de Montataire à
 Rousseloy, 
 s'avançait le général Krug
 avec la colonne principale, composée de cinq 
 escadrons et de quatre pièces. 
 La réunion de ces deux
 dernières colonnes s'opéra bientôt en avant de 
 Rousseloy, 
 et alors l'artillerie prenant position sur les 
 hauteurs situées entre Laigneville
 et Soutraine,
 dirigea son feu sur les bois 
 d'Ars, où se trouvaient nos
 gardes nationaux, puis sur
 la Poste, sur 
 Rantigny
 et sur Cauffry,
 afin de balayer la route de 
 Clermont.  
 
 Assaillis par une grêle d'obus auxquels leurs mauvais
 fusils ne leur permettent pas de répondre d'une
 manière efficace, nos gardes nationaux sont bientôt
 dispersés et forcés de gagner la plaine dans toutes les
 directions. 
 C'est alors que l'infanterie prussienne, 
 descendue des hauteurs, envahit le village de
 Rantigny
 et s'y livre à des actes odieux des maisons
 sont incendiées à la main, et des habitants inoffensifs 
 lardés à coups de baïonnette. 
 Pendant ce temps,
 les cavaliers saxons s'avancent entre
 Ars et 
 Cambronne
 pour fouiller le pays; plusieurs habitants
 d'Angy, qui, sans armes, 
 font néanmoins résolument
 le service d'éclaireurs, sont assez heureux pour
 échapper à la mort, (...). 
 Ils ne sont relâchés qu'après avoir reçu une ample volée
 de bois vert : 
 mit einer derben Tracht Prugel entlassen. 
 
 Ces hauts faits accomplis, l'ennemi continue sa 
 marche deux escadrons et l'infanterie suivent la route
 de Clermont, 
 le reste dela colonne se dirige sur
 Cambronne et
 Auvillers,
 pour gagner la route de
 Mouy. 
 
 Le général Krug
 ne s'avance qu'avec précaution et
 après avoir fouillé le terrain de ses obus.  
 
 Sur les
 hauteurs d'Auvillers,
 où ils ont essuyé un coup de feu, les
 éclaireurs incendient une ferme et ses dépendances. 
 La flamme et la fumée qui s'élèvent en tourbillonnant
 dans les airs sont aperçues de
 Clermont et
 commencent à y jeter l'effroi.  
 
 Quelques gardes nationaux 
 se sont avancés imprudemment deux d'entre eux 
 sont massacrés par les coureurs ennemis. 
 Déjà la
 colonne principale atteint la route de
 Mouy; celle 
 qui s'avance par la route de 
 Creil est dans la plaine 
 de Giencourt;
 les premiers éclaireurs gravissent les
 collines qui bordent la ville de ce côté; deux curieux
 qui, à leur approche, essayent de s'abriter derrière 
 des arbres, sont sabrés sans pitié. 
 Cette scène 
 sanglante s'aperçoit des hauteurs de la ville, et les
 habitants, convaincus que toute résistance est
 désormais impossible, arborent le drapeau 
 parlementaire au clocher de leur église. 
 Au moment où les 
 membres de la municipalité se portent à la 
 rencontre de l'ennemi, une patrouille fait irruption dans
 Clermont;
 le porte-épée de Sporcken, qui la
 commande, déclare au maire qu'il le retient comme 
 otage, qu'il le fera fusiller et brûlera la ville, si un
 seul coup de feu est tiré contre sa troupe: menace
 que les Allemands ne manquaient jamais de proférer 
 et qu'ils mirent trop souvent à exécution. 
 A midi, le général Krug
 fit son entrée dans la ville
 à la tête de ses troupes il était suivi d'une
 soixantaine de chariots destinés à emporter les réquisitions:
 farine, blé, avoine, paille, fourrages, riz, sel, café,
 vin et tabac, furent entassés sur ces voitures, et 
 lorsque les Allemands eurent pris le repas que les 
 
 habitants furent forcés de leur porter aux endroits
 désignés, ils repartirent par la route de
 Creil, emmenant 
 plusieurs notables comme otages. 
 Une arrière-garde 
 de deux escadrons et de deux pièces, sous les ordres
 du major de Schnehen fut laissée à
 Clermont pour 
 enlever et escorter les réquisitions. 
 Les pertes de l'ennemi dans cette journée ayant été 
 nulles ou insignifiantes il est sans excuse pour les
 meurtres et les incendies dont il a marqué son 
 passage. 
 Quant aux quatre-vingts Français tués qui
 auraient été trouvés sur le champ de bataille: Achtzig 
 todte Franzosen auf dem Schlachtfelde gefunden, c'est
 heureusement là une fable inventée à plaisir par
 l'historiographe de la garde prussienne. 
 
 
 Après le départ des Allemands, les habitants de
 Clermont s'abandonnaient
 à l'espoir d'en être pour
 longtemps délivrés; mais leur joie devait être de 
 courte durée, car le 29 la ville fut occupée définitivement
 par le régiment de dragons de la garde qui
 avait pris part à l'expédition de l'avant-veille, et par
 une section d'artillerie.  
 
 En rentrant à Clermont, le
 major de Funcke, chef des dragons saxons, renouvela 
 la menace de ruiner la ville au premier acte 
 d'hostilité c'était la formule préparée par laquelle 
 les Allemands commençaient invariablement leurs 
 discours; les simples soldats avaient, eux aussi,
 leurs phrases comminatoires, et l'on ne peut se 
 figurer le luxe de précautions dont s'entouraient ces
 vainqueurs au milieu de populations atterrées et sans
 armes.  
 
 Après avoir pris possession de
 Clermont, le major
 
 
de Funcke fit
 détruire le télégraphe, et prescrivit une 
série de mesures minutieuses un poste d'une trentaine
 d'hommes, commandés par un officier, fut établi 
 à la gare; un poste semblable placé à la bifurcation 
 des routes de Beauvais 
 et d'Etouy; celles de 
 Mouy et de
 Creil furent gardées avec le même soin
 et parcourues par de nombreuses patrouilles; le
 passage sur ces routes était strictement défendu aux 
 habitants, et la circulation interdite dans la ville à
 partir de neuf heures du soir.  
	
	 Occupation de Beauvais (30 septembre)
	Occupation de Beauvais (30 septembre)
 
 
 
 
 Tandis que Clermont
 recevait une garnison 
 saxonne, le général Senfft
 dirigeait sur Beauvais
 sa
 brigade renforcée de deux bataillons du 2e régiment
 à pied de la garde prussienne. 
 
 
 Parti de Senlis le
 29 septembre, ce détachement arriva le 30, vers
 onze heures du matin, aux portes de 
 Beauvais.
 
 
 
 
 Outre qu'elle avait perdu ses
 remparts, la ville de Beauvais, évacuée par les
 autorités militaires, n'avait aucune troupe régulière à
 opposer à l'envahisseur; le préfet lui-même l'avait
 quittée la veille, et la municipalité, dépourvue de
 moyens de défense, dut inviter la population à 
 s'abstenir de toute attaque.  
 En présence d'une telle attitude, le colonel de
 
Standfest, chef du 
3e régiment de dragons saxons et
 commandant du détachement, ne pouvait guère 
 prendre les allures d'un conquérant; aussi
 s'annonçat-il comme un honnête pourvoyeur qui venait faire
 des provisions, promettant de payer tout ce qu'il
 prendrait.  
 Il engagea les habitants à continuer leur
 marché, et l'intendance de l'armée de la Meuse fit
 immédiatement amener et publier un avis par lequel 
 elle informait les cultivateurs des achats qu'elle 
 désirait faire et des prix qu'elle entendait payer. 
 Par
 ces cauteleuses promesses, qui ne devaient pas être
 longtemps suivies d'effet, les Saxons espéraient faire
 de Beauvais un centre de ravitaillement sans
 s'exposer à soulever les populations, ce qui aurait pu avoir 
 pour eux de graves inconvénients, car ils se
 trouvaient isolés, en flèche et hors de la portée de tout
 secours, au milieu d'une ville de près de quinze mille
 habitants.  
 Pour prévenir ce danger, le colonel de
 Standfest fit publier partout une proclamation, en
 dix articles, dans laquelle il faisait connaître, entre
 autres choses, que toute attaque faite par surprise 
 aurait pour conséquence l'incendie du lieu, et que
 les communes étaient rendues responsables de
 tout acte d'hostilité commis sur leur territoire. 
 
 La responsabilité des communes avait été indiquée
 par Napoléon Ie comme un des grands moyens 
 moraux à employer pour maintenir dans l'obéissance les
 pays conquis; les Allemands allaient appliquer ce
 principe avec la dernière rigueur, et nous ne verrons
 que trop souvent les populations punies par le
 meurtre, le pillage et l'incendie, pour des faits de guerre
 qu'elles ne pouvaient ni moralement ni matériellement 
 empêcher.
 
 
	
	 Reconnaissance des Saxons sur Breteuil (1e octobre)
	Reconnaissance des Saxons sur Breteuil (1e octobre)
 
	A peine installés, les Saxons poussèrent en avant
	 de fréquentes patrouilles, afin de s'éclairer dans les
	 principales directions.  
	 Le 1e octobre, une reconnaissance,
	 composée d'un escadron des dragons   de la 	 garde 
	 sous les ordres du capitaine de Klenck, partit 
	  de  Clermont sur 
	  Breteuil. 
	  Cette dernière ville avait
	  alors comme garnison un  bataillon de marche du
	  43e de ligne, 
	  le  2e bataillon des mobiles de la Marne 
	  et le  4e de la Somme.  
	  En outre, la gare était occupée 
	  par un autre bataillon de mobiles. 
	  
	  Connue à  Breteuil vers midi,
	  l'approche de l'ennemi
	  y causa une alerte 
	  des plus vives; plusieurs compagnies prirent les armes
	  et se rendirent à leurs positions de combat; mais les 
	  dragons, après avoir observé quelque temps nos
	  avant-postes et reconnu le terrain, tournèrent bride
	  sans avoir été inquiétés. 
	  
	  En passant à Saint-Just , le 
	  capitaine de Klenck  annonça l'arrivée pour le
	  lendemain d'un détachement de 5000 hommes et de 
	  deux batteries, pour lesquels il fit préparer le
	  logement. 
	  
	  Ce stratagème, très-familier aux Allemands,
	  était alors peu connu de nos troupes ; en apprenant
	  cette nouvelle, la garnison évacua Breteuil . 
	  
	  On était 
	  tellement persuadé que la ville serait occupée le
	  lendemain par la colonne ennemie annoncée à
	  Saint-Just , que l'on fit sauter derrière nos soldats
	  le viaduc 
	  de Courcelles, sans prendre même le temps d'évacuer
	  le matériel du chemin de fer, qui tomba plus
	  tard entre les mains de l'ennemi.  
	  
	  Le 2 octobre, les
	  Saxons revinrent en effet, mais fort peu nombreux,
	  et, après s'être assurés du départ des troupes 
	  françaises, ils reprirent la route de Clermont . 
	  
	  Ainsi, au commencement d'octobre, la division
	  de cavalerie saxonne du comte de Lippe , forte de
 
 
 seize escadrons et de dix-huit canons, et à laquelle 
 on avait adjoint trois bataillons du 2e régiment à pied
 de la garde prussienne, avait occupé, sans rencontrer
 de résistance sérieuse, les villes de Senlis, Chantilly,
 Creil, Clermont, Beauvais , et, étendant peu à peu
 son rayon d'occupation, couvrait le cours moyen de
 la rivière de l'Oise. 
	
	 Engagements dans la vallée basse de l'Oise
	Engagements dans la vallée basse de l'Oise
 
	Pendant ce temps, dans la vallée basse, déjà si
	éprouvée par le premier passage de l'ennemi, la 
	présence continue de ses fourrageurs avait fait naître
	une émotion croissante et une indignation mal 
	contenue. 
	
	Dès le 21 septembre, le général d'infanterie 
	d'Alvensleben
	,
	commandant le IVe corps
	, qui occupait
	Saint-Brice
	, avait lancé ses détachements de
	réquisition dans la direction de
	Pontoise et de 
	l'Isle-Adam.
	Dans cette dernière ville, les Prussiens, n'étant pas
	satisfaits des fournitures, brisèrent les portes des
	habitations et des caves, et se livrèrent à des actes
	de pillage et de vandalisme qui exaspérèrent la
	population.
	Quelques hommes de cœur, des gardes
	nationaux mal armés, des volontaires avec leurs fusils
	de chasse, habitants de Parmain,
	de  l'Isle-Adam
	, de 
	Valmondois
	et des communes voisines, résolurent
	de châtier ces pillards.
	
	
	 Embuscade de Stors (23 septembre)
	Embuscade de Stors (23 septembre)
 
	
	
	Le 23 septembre, ils
	dressèrent des embuscades sur la rive gauche de l'Oise,
	en face du château de Stors, et des fourrageurs
	prussiens, qui revenaient de réquisitionner à
	Pontoise,
	furent surpris à leur retour par une vive fusillade qui 
	leur blessa quelques hommes, entre autres un
	officier du
	71e régiment d'infanterie,
	chef de l'escorte.
	
	
	Ils s'enfuirent aussitôt dans toutes les directions,
	abandonnant treize fourgons chargés et une douzaine 
	de chevaux, que les nôtres s'empressèrent de faire
	passer sur l'autre rive et dirigèrent sur Beauvais.
	Le bruit de cette capture s'étant répandu dans les 
	environs, donna aux habitants l'idée de se défendre
	d'une façon sérieuse, et les hostilités, ainsi 
	commencées, se continuèrent les jours suivants.
	
	
	
	 Rencontre de Mériel (26 septembre)
	Rencontre de Mériel (26 septembre) 
 
	
	
	Le 26, un détachement du 86e régiment de Schleswig-Holstein
	s'étant avancé dans la direction du château de Stors,
	essuya, sur le territoire de Mériel, des coups de feu qui
	lui blessèrent quatre ou cinq hommes.
	A l'Isle-Adam, 
	le génie français avait détruit, dans les premiers jours
	de septembre, le pont qui relie cette ville au hameau
	de Parmain; sur la rive droite, à l'extrémité du pont
	rompu, une cinquantaine de francs-tireurs
	improvisés élevèrent une barricade pour empêcher l'ennemi
	de rétablir le passage.
	
	
	 Combats de l'Isle-Adam et de Parmain (27-29 septembre)
	Combats de l'Isle-Adam et de Parmain (27-29 septembre) 
 
	
	Le 27 septembre, vers neuf 
	heures du matin, un nouveau détachement, 
	appartenant au 71e régiment d'infanterie prussien et fort 
	d'environ trois à quatre cents hommes, arrivait à
	l'Isle-Adam, escortant une quarantaine de voitures
	destinées à de nouvelles réquisitions.
	Poussant devant
	eux le curé et son vicaire, le maire et un autre 
	habitant, qui devaient leur servir de boucliers, les
	Prussiens marchent vers le pont; mais un feu nourri, 
	parti de la barricade, en renverse plusieurs,
	épargnant heureusement les nôtres, et force les 
	assaillants à se réfugier dans les rues de la ville, où ils
	luttent jusqu'à cinq heures du soir.
	Ayant reçu dans
	la journée'quelques renforts avec une section
	d'artillerie, ils lancent sur 
	Parmain une douzaine d'obus,
	qui n'y causent que quelques dégâts matériels et ne
	
	
	font aucun mal aux défenseurs. 
	
	En présence de
	l'attitude des francs-tireurs, qui leur tuèrent un homme 
	et en blessèrent huit à dix autres, ils se retirèrent
	dans la soirée sur leur camp de
	Saint-Brice, après
	avoir mis le feu à la mairie et fustigé dans la forêt,
	à la manière prussienne, une dizaine d'habitants
	inoffensifs, qui n'avaient commis d'autre crime que
	celui d'être spectateurs de leur déconvenue.
 
	
	La résistance opposée par cette poignée d'hommes
	résolus ne tarda pas à exciter de l'inquiétude parmi
	les Allemands; le quartier général de l'armée de la
	Meuse s'empressa de diriger sur l'Isle-Adam un 
	nouveau détachement prussien, commandé par le
	colonel prince de Hohenlohe,
	et composé d'un bataillon 
	du 27e d'infanterie, 
	du 1e régiment de uhlans de la
	garde, et d'une section d'artillerie, avec l'ordre de
	purger définitivement la contrée.
	Le 29, vers midi, 
	une partie de cette colonne arrive à
	l'Isle-Adam, et
	recommence, sans plus de succès, la tentative faite
	le 27 pour enlever la barricade de
	Parmain; mais
	cette fois l'attaque de front n'a vraisemblablement 
	d'autre but que d'occuper les francs-tireurs, car, 
	pendant ce temps, le reste du détachement jette un pont
	de bateaux à Mours, 
	près de Beaumont, et s'apprête
	à franchir la rivière de l'Oise, pour prendre la 
	barricade à revers.
	Nos francs-tireurs, avertis à temps, 
	évacuent leur position, n'ayant fait d'autres pertes,
	dans ces divers combats, que celles d'un tué et d'un 
	blessé.
	Quant à l'ennemi, il avait eu, dans la journée
	du 29, un chirurgien et deux hommes tués, plus une
	vingtaine de blessés, dont un officier, appartenant
	tous au 27e régiment d'infanterie de Magdebourg.
	
	
	
	 Incendie de Parmain (30 septembre)
	 Incendie de Parmain (30 septembre) 
 
	
	
	Lorsque les Prussiens arrivèrent à Parmain, dans
	
	
	la matinée du 30 septembre, ils n'y trouvèrent que
	des habitants inoffensifs, qu'ils accablèrent de 
	mauvais traitements; une cinquantaine de maisons furent 
	incendiées à l'aide du pétrole, et le village à demi 
	consumé; celui de Nesles fut bombardé, et plusieurs
	francs-tireurs, pris dans la campagne les armes à la 
	main, furent fusillés
	à Persan dans la même journée. 
	
	L'une de ces victimes était un ancien magistrat,
	nommé Desmortier, vieillard plus que septuagénaire,
	dont la bravoure dans un si grand âge aurait désarmé 
	tout autre ennemi.
	Pour allier le grotesque au 
	tragique, les Prussiens couronnèrent cette sanglante
	exécution par un de ces exploits qu'on ne grave pas 
	avec la pointe d'une épée en passant dans une ferme
	du Val, les fourrageurs font une razzia sur un
	troupeau de moutons, qu'ils emmènent et essayent de
	parquer dans une cour de Presles mais ces prisonniers 
	d'un nouveau genre, saisis d'une peur subite, se
	pressent vers la porte et s'échappent dans la
	campagne, après avoir bousculé leurs gardiens stupéfaits,
	qui essayent vainement de les poursuivre.
	
	
	
	 Marche du détachement du prince Albert (fils)
	 Marche du détachement du prince Albert (fils) 
 
	
	Ainsi, dans les premiers jours du mois d'octobre,
	les Prussiens occupaient fortement la vallée basse de
	l'Oise, sillonnant de leurs patrouilles les cantons de
	Marines et 
	de Magny; le 4, ce détachement fut
	renforcé par
	le 3e régiment des uhlans de la garde, et
	placé sous le commandement
	du prince Albert (fils).
	Le prince Albert devait agir de concert avec le comte
	de Lippe, et nous suivrons plus tard la marche 
	combinée de ces deux détachements.